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Témoignage de Patrick

Voici un témoignage d’un conjoint et père de victimes d’inceste. Patrick a bien voulu nous faire don de son témoignage. Vous constaterez que non seulement les victimes peuvent avoir des «Flashbacks», mais aussi le conjoint et le père de ces victimes. Des «Flashbacks » qui font mal à la conscience. Patrick qui a une grande colère envers l’agresseur… Colère qui est tout à fait légitime… et qu’il tente d’oser exprimer dans la conscience de façon constructive et positive. Il y travaille fort… Malgré ces drames… à travers une psychothérapie, il apprend non seulement à soutenir et aider sa conjointe et ses enfants, mais il apprend à prendre soin de lui… Il apprend avec un tel courage à se découvrir… lui en tant qu’être humain… Sa coquille éclate pour qu’il puisse renaître… Merci Patrick de venir partager ton expérience. Je suis certaine que d’autres conjoints sauront en bénéficier. BIG HUG! BlancheXX

 

Le 6 février 2004

Bonjour Blanche,

Je te fais part de ce que l’on a vécu comme dénonciation et offre aussi mon 27ième mandala.

Patrick

BUG de l’An 2000
Découverte de l’inceste

Pour commencer, je suis le conjoint d’une victime d’inceste, étant enfant. Nous nous connaissons depuis 27 ans. Après toutes ces années à connaître sa famille, je me suis aperçu depuis longtemps que tous les membres de sa famille se protégeaient les uns des autres. J’ai eu des doutes qu’il se passait de drôles de choses… J’en ai eu souvent, mais j’ai toujours fait confiance à ma conjointe en me disant que c’était sûrement pas grave… ce que j’avais entendu… Car si c’était grave, elle me le dirait car je lui faisais confiance et croyais que l’on se disait tout… et que c’était sa vie de famille.

Voilà, à force de me dire que j’avais confiance, nous nous sommes rendus à « l’an 2000 », après 23 ans de connaissances et 15 ans de mariage, et 2 belles filles (9 et 12 ans). Le fameux « BUG » de l’An 2000… Tout un « BUG » que le monde attendait…. Pour un « BUG » , cela a été tout un « BUG »!

À Noël 1999, j’ai appris par un de mes beaux-frères qu’il y avait quelque chose qui se passait dans la famille de ma conjointe sans trop me dire les détails. Il m’a seulement fait part qu’il s’était passé quelque chose chez un autre beau-frère (frère de ma conjointe) en me demandant: « Qu’est-ce qu’il y avait de plus cher au monde à ce beau-frère X ? » J’ai répondu: « Sa fille ». Il me dit alors: « Je ne t’ai rien dit… mais je t’ai tout dit… » Car il m’avait dit que le beau-frère X protégeait son père et qu’il ne comprenait pas pourquoi…

Je me suis mis à penser à tout cela… moi aussi… J’ai commencé à étudier ce qu’il se passait autour de moi, et à voir comment les personnes agissaient… J’ai réfléchi toute la semaine entre Noël1999 et le Jour de l’An (2000). Au Jour de l’An, cela se faisait chez le beau-frère X. Je regardais le monde… J’ai éprouvé un drôle de sentiment… Du genre… drôle de regard envers moi… comme si ils se demandaient si je savais quelque chose… J’éprouvais ce sentiment en présence de mon beau-frère X et de ma belle-soeur Y.

Revenu chez nous, la semaine après le Jour de l’An, j’ai été travaillé sauf le jeudi. J’ai été reconduire nos deux filles à l’école et je suis rentré chez moi. Mon épouse a trouvé étrange que je ne travaille pas ce jour-là. Je lui ai demandé ce qui se passait dans sa famille car j’avais le pressentiment que l’on me regardait en se demandant si je savais quelque chose avec un peu de pression. J’ai fini par savoir que son autre frère, lui avait téléphoné au début de l’année 1999 pour lui demander si ses filles lui avait fait part que leur grand-père les avait attouché, car deux de ses filles leur avaient fait part à lui et sa conjointe que leur grand-père les avaient attouchées.

À ce moment-là, j’ai demandé à ma conjointe: « Toi… t’a-t-il touché lorsque tu étais jeune? » Elle m’a répondu: « Oui » en sanglots… Après elle m’a fait part du téléphone de son frère en début de 1999 (Jour que je me souviens très bien comme conjoint). Après tout cela, je ne savais plus quoi faire… Je savais bien que tout le monde ne voudrait pas que cela se sache… J’ai réfléchi… J’avais la tête qui allait exploser…

Aller chercher de l’aide

J’ai finalement dit à ma conjointe que je ne savais plus quoi faire et que j’allais voir un psychologue car je n’en pouvais plus…

J’ai consulté et je lui ai raconté Noël et le Jour de l’An ainsi que pour mon épouse et le coup de téléphone de son frère. Il m’a dit que d’habitude, il rencontrait le conjoint et après la conjointe et en troisième lieu, les deux ensembles. Ce que nous avons fait…

Après ces rencontres, nous nous sommes présentés pour la troisième rencontre… Il nous a dit que vu qu’il y avait des enfants d’impliqués, il nous donnait 10 jours pour que l’on contacte les membres de la famille et faire quelque chose… Sans cela, il n’avait pas le choix de contacter la DPJ (Direction de la Protection de la Jeunesse) pour faire arrêter l’agresseur.

Après une rencontre avec son frère aîné… son épouse nous a dit de vérifier avec nos filles car leurs filles leurs avaient dit que cela serait possible qu’elles auraient été abusé elles aussi… Sachant que mon épouse leur avait déjà demandé et que la réponse avait été négative… j’ai décidé de leur demander moi-même.

Je me suis assis avec ma fille aînée… Elle voulait savoir ce que l’on avait été faire chez son oncle la journée d’avant… Je lui ai dit… Après une discussion, elle m’a dit que «OUI», elle avait elle aussi été attouchée… Voilà de quoi a eu l’air le « VRAI BUG de l’An 2000».

Sentiment de vengeance

Difficile d’apprendre que sa conjointe a été abusé par son père, mais d’apprendre que nos deux filles l’ont été… elles aussi par leur grand-père… C’est TRÈS DIFFICILE de ne pas vouloir se venger de celui qui a profité de moi et de tous les membres de ma famille. Quand je vois des pères se venger à cause que leur enfant a été abusé par un «PÉDOPHILE», je les comprends… J’ai eu beaucoup de misère à me retenir…

Je me suis mis à faire des cauchemars… des choses que j’ai vues… situations que je trouvais drôles, bizarres… et je me posais des questions quand je voyais mes filles dans certaines situations sans rien voir de mal… et je me demandais pourquoi elles avaient l’air mal à l’aise… Quand j’ai réalisé qu’à certaines occasions mon épouse avait vécu des essais de récidive de la part de son père… et que je l’ai entendu… lui dire:« NON! Lâches-moi! » etc. Au moment que j’ai entendu cela… je pensais qu’elle jouait avec son père… Aujourd’hui, je sais à quel jeu lui voulait jouer… Pas besoin de dire comment je comprends un père de victime ou un conjoint qui se venge envers l’agresseur…

J’ai failli me venger à quelques reprises, mais je me suis accroché à mes 2 filles. Car elles ont une vie à vivre et sans père pour subvenir à leurs besoins… elles auraient plus de misères… pour ce qu’elles ont vécu… Et si je me vengeais… «JE serais mis en prison sur le champs et sans thérapie… Contrairement à l’agresseur qui a été pris en charge avec thérapie sans rien à faire et payer… »

Entre venant en aide aux victimes d’inceste

Après que nos 2 filles nous ont confié ce qu’elles ont vécu, nous avons demandé à rencontrer les frères et soeurs de ma conjointe. Après deux heures trente de route enneigée, nous avons rencontré tout le monde avec leurs conjoints. Nous avons appris que l’autre frère de ma conjointe a lui aussi une fille de 5 ans qui a vécu, elle aussi, l’inceste de son grand-père. Le lendemain, nous avons contacté un organisme pour personne victime d’inceste. Il nous a suggéré de porter plainte à la police… Ce que j’ai fait en retournant chez nous.

Dénonciation de l’agresseur malgré la pression vécue

Au moment où j’ai signé la déposition pour mes filles, j’ai eu un sentiment énorme soulagement de sur mes épaules car je ne savais pas comment les autres membres de la famille réagiraient. Car le jour où j’ai porté plainte à la police, ma belle-soeur a commencé à me parler de « PARDON », le matin même, le 14 février 2000. La veille, nous avions couché chez elle et son conjoint. J’ai porté plainte pour mes filles, et ce faisant, je savais que les autres n’auraient pas d’autre choix eux aussi…

L’enquête policière et arrestation de l’agresseur

Après que les policiers ont fait enquête et que tous les enfants concernés ont fait leur déposition par vidéo, ils ont procédé à l’arrestation de l’agresseur incestueux. Ils lui ont fait suivre une thérapie qui a durée environ 10 mois. Il n’a pas eu besoin de faire quoi que ce soit tout était gratuit.

Nous avons conduit nos deux filles en thérapie pendant 10 semaines au centre pour victimes d’agression sexuelle à 2h30 de chez nous, car ont croyait que ce serait plus facile si elles étaient avec leurs cousines. L’agresseur lui a été accusé le mois suivant car c’était le même centre qui s’occupait de la thérapie des victimes et des agresseurs. Pendant ces 10 semaines, les intervenantes nous ont dit à moi et à ma conjointe que cela serait bon que nous aussi puissions suivre une thérapie… Moi en tant que conjoint, je me disais que j’en avais pas besoin… mais pour aider ma conjointe, j’y suis allé pour la supporter dans cette épreuve.

La thérapie

À ce moment-là, en thérapie avec les enfants tous les membres de la famille n’ont pas été avec leurs enfants… Pour les premières rencontres, oui… mais après… ce sont les conjointes qui ont été sauf ma conjointe en tant que membres de la famille et victime. Les autres ont un peu fait comme si rien ne s’était produit sauf qu’ils ne devraient pas laisser leur enfant seul avec l’agresseur. Nous avons tout fait pour protéger l’identité des victimes car nos nièces ont le même nom de famille que l’agresseur et vivent dans la même région.

A près la thérapie avec nos filles, mon épouse a contacté « IVAC » (Indemnisation pour les Victimes d’Actes Criminels). Après presque une interrogation pour voir si elle était vraiment une victime… il lui ont donné 3 noms de psychologue à consulter. En les contactant, elle a eu comme réponse que certains ne prenaient plus de nouvelles patientes… certains ne faisaient pas ce genre de thérapie… Elle a dû trouver quelqu’un par elle-même… Elle a trouvé une psychologue qui l’a pris… Après quelques rencontres, j’ai pris contact avec cette même psychologue en tant que conjoint de victime, mais elle ne faisait pas de thérapie en parallèle. C’était en tant que soutient moral pour la conjoint qu’à un intervalle de 1 rencontre par mois en tant que « thérapie passive ». Durant ces rencontres, j’ai réalisé ce que pouvait être les séquelles qu’ont les victimes… Car aussi banal que cela puisse paraître, des choses du quotidien qui dérangent dans un couple. C’est une très bonne psychologue , mais après 1an 1/2 de consultation, moi et ma conjointe avions le sentiment de s’éloigner l’un de l’autre. Car depuis le début, je n’avais qu’un seul but: d’aider ma conjointe à s’en sortir… car elle n’avait rien fait pour vivre ce qu’elle a vécu dans sa vie et n’a pas demandé à naître dans cette famille.

Lecture du « Le secret de Blanche» & Psychothérapie avec Mme Blanche Landry

Comme nous nous sentions éloignés l’un de l’autre, nous avons commencé à chercher un autre thérapeute… Et mon épouse a rencontré une personne qui avait vécu l’inceste. Cette personne lui a prêté le livre « Le secret de Blanche ». Après avoir lu ce livre, ma conjointe a pris contact avec Mme Blanche Landry. Et depuis nous allons en thérapie avec elle. Je peux dire qu’en tant que conjoint de victime, je ne pensais pas aller en thérapie aussi longtemps, mais après plusieurs rencontres avec Mme Landry, nous nous sommes rapprochés…

Je réalise aujourd’hui que pour passer à travers… je me suis accroché à mes enfants… mes deux filles qui ne méritent pas de vivre la séparation de leurs parents. En plus des souvenirs qu’elles devront traîner tout le long de leur vie et des séquelles qu’elles devront affronter et confronter… Si je vais en thérapie c’est pour pouvoir comprendre ce qui se passe dans la tête d’une personne qui a vécu l’inceste. Car la vie des conjoints aussi est mélangée… On peut penser au niveau sexuel dans le couple, mais aussi beaucoup de chose dans la vie de tous les jours.

Je veux aider ma conjointe à se retrouver pour que l’on puisse aider nos deux filles qui méritent toute l’aide du monde possible. En tant que conjoint, je dois payer la thérapie. Pour moi et ma conjointe, les assurances ne couvrent pas les consultations avec Mme Landry. Cependant, Mme Landry nous fait réaliser les choses plus rapidement que ce que l’on a fait avec l’autre psychologue en « thérapie passive ». Elle nous fait prendre contact avec nous-même. Et quand je pense qu’un jour, je devrai payer sûrement pour une thérapie pour délivrer nos filles des séquelles que leur a fait subir leur grand-père… quand je pense à cela, je peux dire que la colère remonte à la surface et je comprends ceux qui tabassent l’agresseur. Il me faut pas perdre de vue que si je le touche… en quelque sorte, je n’aurai pas la chance que les agresseurs ont face à la justice, et moi je vais aller en prison direct.

Condamnation de l’agresseur incestueux

Pour ce qui est de l’agresseur et de la condamnation… Après la cour juridique, nous avons été appelés par le procureur de la Couronne… tous ceux qui avaient porter plainte… pour savoir ce que nous voulions comme sentence. Le procureur de la Couronne nous a expliqué que les agresseurs d’inceste en prison ne sont pas mis avec les autres car ils passeraient au «cash ». Mais que maintenant, ils peuvent avoir une condamnation à un emprisonnement à domicile (HOME-JAIL). Certains membres de la famille ne voulaient pas cela trop longtemps pour leurs raisons. Mais j’ai osé dire qu’il devrait avoir au moins 3 mois de véritable emprisonnement. Une personne de la famille a dit qu’il devrait avoir la prison, mais cette personne n’ayant pas porté plainte, cette demande n’a pas été pris en considération. Le procureur de la Couronne nous a dit aussi que si il trouvait que nous demandions pas assez qu’il augmenterait la demande. L’agresseur, a été condamné à 3 mois de HOME -JAIL, plus 2 ans de probation avec restriction.

Je peux dire aujourd’hui qu’avant l’an 2000, je ne portais pas trop attention aux sentences qu’avaient les agresseurs sexuels, mais depuis ce temps-là quand je vois certains cas où les sentences sont plus élevées… ont se rend bien compte que pris par les sentiments de divulgation… les préoccupations de ce que vont vivre les enfants à l’école, l’étiquette qu’elles vont avoir… nous n’avons pas demandé assez en fait de sentence. Si c’était à refaire, je demanderais la prison sans hésiter.

Je réalise aujourd’hui que la justice… il en a autant qu’il y a de causes… En tant que justice, il devrait avoir une justice pré-établie, et on ne devrait pas demander aux victimes ce qu’elles veulent comme sentence pour leur agresseurs. La justice devrait condamner les « agresseurs sexuels » d’après les actes commis. Car les victimes doivent passer le reste de leur vie avec ces images à chaque matin… Chaque instant de leur vie, elles devront à tout moment quand elles ne s’en attendent même pas… elles devront vivre avec les « Flashs » de leurs agressions, et ce, même dans les moments les plus intimes avec leur conjoint. Et si la justice pense seulement que les victimes sont affectées et qu’avec ‘une thérapie… elles vont oublier… C’est faux. La thérapie peut les aider à mieux accepter ce qu’elles ont vécu… à mieux gérer certaines séquelles, mais lors d’une relation sexuelle avec leur conjoint, lui aussi peut ressentir les effets néfastes que la conjointe a vécus. Et ce n’est pas en faisant une seule thérapie que tout va pour le mieux. Tout cela se reflète même sur les enfants que l’on met au monde. On veut pourtant leur donner ce qu’il y a de mieux, si on veut vraiment donner le meilleur à nos enfants. La justice devrait commencer par avoir une loi et une condamnation.

Pour moi les pédophiles devraient en plus de leur condamnation avoir 4 lettres tatouées dans le front (PEDO) pour que les petits enfants puissent les reconnaître. Qu’ils soient eux aussi comme les autres victimes… étiquetés pour la vie qu’ils leur reste… qui est très souvent plus courte que celle des victimes… Tout le monde a une vie à vivre et je ne crois pas que mon épouse et nos filles méritent des souvenirs comme ceux-là. Mais nous devons vivre avec… les comprendre… les surmonter… mais pas oublier… Ne pas faire semblant car un jour la réalité est là… quoi que l’on fasse… elle rattrape les victimes quand elles ne s’en attendent le moins du monde.

Une autre victime s’ajoute à la liste

Aujourd’hui, 4 ans plus tard, une autre victime s’est ajoutée… Après des cauchemars et thérapie, elle a pris conscience qu’elle avait été violée… par son grand-père, elle aussi… Ceux qui faisaient semblant… on pu réviser leur façon d’être avec l’agresseur incestueux, mais continus tout de même à le voir à certaines occasions. Je considère que les petites victimes n’ont pas à être en contact avec leur agresseur, même s’il y a avec elles, d’autres adultes en présence de l’agresseur. Je trouve cela très néfaste pour leur bien-être intérieur. En tant que parents, nous devons protéger nos enfants… ne pas les mettre en situation inconfortable. Car au début de l’An 2000, nous avons revu leur agresseur à une ou deux reprises avec nos filles, j’ai remarqué qu’elles n’étaient pas à l’aise… Je sentais une certaine distance envers moi…

Rapport d’IVAC &« Flashbacks » du conjoint

Au début de l’An 2001, mon épouse a trouvé une psychologue (celle mentionnée précédemment). C’est elle qui a évalué nos deux filles. Après un peu de temps, nous avons reçu un rapport de « IVAC ». Quand j’ai lu le rapport, j’ai remarqué que la psychologue avait diagnostiqué une « tendance négative envers les hommes » pour l’une de nos filles. Après plusieurs « Flash back » (pas seulement les victimes qui en ont…), j’ai réalisé que lorsque son grand-père la berçait… que je ressentais une drôle d’impression et que je n’avais rien vu… il s’était réellement passé quelque chose… et elle ne s’était pas sentie protégée par son père.

Après ces « Flash back», un soir que mes deux filles étaient toutes les deux seules au sous-sol, je leur ai dit que je voulais leur parler… Alors, je leur ai demandé si elles tenaient à revoir leur grand-père, elle ne m’ont répondu: « Pas plus que cela ». Alors je leur ai dit: « Moi, je ne veux plus le voir pour le moment, et que peut-être qu’un jour, je vais lui dire directement. » Je leur ai dit aussi que j’avais le souvenir qu’une fois…

« Je remontais du sous-sol de chez vos grands-parents, et que j’ai entendu votre grand-mère dire à votre grand-père: « Non X » au moment où les marches de l’escalier «craquaient » . Cela s’est produit à 2 reprises. Ce matin-là, quand je remontais du sous-sol, je ne savais pas pourquoi… mais le 3ième matin, j’ai fait une grande enjambée pour ne pas faire « craquer » les marches car votre grand-mère cuisinait près du poêle. J’ai monté sans faire de bruit… passé près du poêle… et je suis allé directement au salon où se trouvais votre grand-père qui berçait une petite fille (sans la nommer). J’ai vu sa main cachée par la robe de la petite. Au même moment, j’ai vu votre grand-mère qui est venue me rejoindre au coin de la table comme pour faire diversion. Je me souviens que c’était vers le mois de juillet ou août, car la porte intérieure était ouverte… Il y avait le moustiquaire de la porte extérieure et que j’ai fixé dehors en me demandant ce que j’avais vu… car je n’ai pas vu sa main bouger… Mais un gros point d’interrogation s’est allumé dans ma tête.»

Excuses à ses filles de ne pas avoir pu les protéger & Rapprochement de celles-ci

C’est alors que j’ai dit à mes deux filles que je m’excusais: « Il y a peut-être des fois qu’il vous a fait des choses qui n’étaient pas bien. Et j’étais là… mais je ne savais pas ce qu’il faisait… Si vous pensez que je ne voulais pas vous protéger… C’est faux. Je ne savais ce qu’il faisait… Mais aujourd’hui, je veux seulement vous protéger… Si vous voulez le revoir… vous le verrez que lorsque vous aurez 18 ans. Mais dites-vous bien qu’un pédophile n’est jamais guérit, et qu’au moment où vous irez le voir ce sera vos affaires… Je ne serez pas là pour vous protéger.»

Depuis ce soir-là, mes filles se sont rapprochées de moi. Je comprends maintenant que quand les enfants ne se sentent pas protégés, ils ont tendance à s’éloigner de nous. Le seul conseil que je peux donner, c’est si vos enfants ont été abusé et que vous les trouvez distants… dites-leurs comment vous vous sentez à l’intérieur… Osez leur dire les vraies choses, ils vont faire le reste… Surtout donner leur le temps de comprendre… Les enfants ont besoin de se sentir protéger par leurs parents. Les parents aussi ont droit à des erreurs car il n’y a pas de cours pour être parents.

Ne pas minimiser les abus

Lors de dénonciation, en premier lieu, surtout ne pas minimiser ce qui s’est passé… Car du côté de l’agresseur, lui veut tout minimiser… En tant que conjoint de victime, s’accrocher à ceux qui nous sont chers, conjointe et enfants. Se dire que ce que l’on voit n’est que la pointe de l’iceberg. Et lors de la condamnation, ne pas avoir peur de demander plus car après, il est trop tard pour demander plus. Il est trop tard pour avoir des remords. Ne pas oublier que l’agresseur est très souvent un manipulateur expert et un menteur. Si lui est comme ça, certains membres de la famille le sont aussi, et en tant que conjoint de victime, vous devez faire face à ceux-là aussi. Vous vous sentirez seuls par moment. Car ceux-ci ne voudront pas que tout cela s’ébruite… car ils vont être étiqueter à l’inceste. Même en 2004, l’inceste reste toujours un « tabou ».

Protéger mes filles

Depuis le dévoilement ou dénonciation de l’An 2000, je me suis fixé comme but de protéger nos deux filles. Pour moi, ce n’est pas une bonne chose de les remettre en contact avec leur agresseur. C’est arrivé qu’elles revoient leur grand-père et j’ai trouvé qu’elles étaient mal à l’aise… Je n’ai pas aimé ces situations. Lors de la dénonciation, ne pas croire que la justice va tout régler. Car si la victime décide de ne pas envoyer l’agresseur en prison, le dévoilement est beaucoup plus difficile car les personnes près de l’agresseur font tout pour que ça ne se sache pas. Et les victimes doivent dans un certain sens continuer à être victime pour ne pas décevoir ou même ont peur d’être rejetées par les leurs. Elles sont toutes mélangées entre le bien et le mal.

Lors de la dénonciation ou dévoilement, il faut arrêter de vouloir sauver tout le monde et penser à soi et à ses enfants pour mieux les protéger. Vivre pour soi, car l’on peut avoir rendu bien des services autant de fois que possible dans le passé, en pensant que les autres vont nous aider le jour où l’on aura des problèmes. Désolé quand les problèmes surgissent… on se retrouvent seul. Et tout le monde cherche à nous influencer du genre: « Faites-vous quelque chose pour que ça revienne…» ou encore « Vas-tu pardonner un jour?» Tout pour influencer notre décision mais pour minimiser l’impact de divulgation afin que leur vie ne change pas trop. Et qu’ils n’aient pas de compte à rendre à leurs oncles et tantes ou leur amis pour ne pas avoir à dire que leur père est pédophile.

Lors de la dénonciation, les victimes doivent être prêtes car si vous pensez que vos frères, soeurs, beaux-frères, belles-soeurs sont sincères et francs, c’est à ce moment-là que vous le saurez… N’hésitez pas pour la photo dans le journal car cela ne fait qu’un temps… Oncles et tantes l’apprendront… Si vous ne le faites pas…les victimes auront autant de temps travail à faire qu’il y a de membres dans la famille. Et quand vous le direz… les oncles et tantes seront être de votre côté, mais quand il vont rencontrer le pédophile, ils peuvent devenir septique. le travail de le dire et de maintenir… doublement difficile d’être victime. C’est là qu’on voit que les pédophiles sont très manipulateurs… Plus les gens parlent avec eux… plus les victimes sont encore plus victimes, si elles ne sont pas prêtes à se battre pour la vérité.

Thérapie pour le mieux-être de notre famille

Aujourd’hui avec la thérapie, je réalise qu’un agresseur est aussi un voleur. Car à chaque fois qu’il a agressé une victime, il lui a volé une partie de sa vie et en même temps, a volé une partie de la vie de son conjoint ou future conjoint. Et cela est très difficile à accepter… Quand on voit que en 3 ans 1/2 de thérapie, on a dépensé le même montant que 3 voyages dans le Sud. Souvent la colère remonte à la surface… Mais il ne faut surtout pas perdre de vue que tout cela est pour le mieux-être de notre famille, car la famille est bien celle que l’on bâtie et non celle d’où l’on vient…

Mon 27ième mandala

Gagner en clarté

« Je descends dans mes profondeurs intérieures
et gagne en clarté quant à mes désirs et mes objectifs.»

 

16 janvier 2004

Gagner en clarté… Je prends conscience que j’ai toujours vécu en voulant rendre tout le monde heureux autour de moi… Mais je me suis oublié… Je n’ai pas souvent pensé à «me rendre heureux». Aujourd’hui devenu père, soutien familial et pourvoyeur de cette famille que j’aime plus que moi-même, je n’ai pas d’autre choix que de continuer… Mais parfois, je m’arrête pour réfléchir à tout ce que l’on a vécu depuis « l’An 2000 ».

En premier lieu, quand on a décidé d’avoir des enfants, nous avons décidé d’un commun accord que c’était mieux pour les enfants que mon épouse demeure à la maison. Pour que nos enfants aient le meilleur que l’on puisse leur donner… Lorsque celles-ci iraient à l’école, mon épouse irait sur le marché du travail. 1996 est arrivé avec l’esprit tordu de son père avait et a encore… Il a détruit et modifié une partie de notre vie. Car mon épouse a eu de la difficulté à retourner sur le marché du travail. Je voyais qu’elle n’était pas prête à retourner travailler… J’ai respecter tout cela… et continuer de pourvoir à ma famille.

Je réalise qu’il a détruit intérieurement beaucoup plus que sa propre fille et ses petites-filles, mais il a contribué à modifier l’intérieur de notre couple et cela pour très longtemps. Depuis 1990, éprouvé par la perte de mon emploi, j’ai dû retrouver un autre travail assez payant, mais l’ambiance de travail n’est pas très bonne. Aujourd’hui, j’aimerais pouvoir le quitter… et faire autre chose, mais mon rôle de pourvoyeur familial m’en empêche… Et je vois mon épouse très bouleversée avec de la difficulté à voir clair dans ses sentiments envers sa famille. Ce sont toutes les séquelles… provenant de son père… qui l’a démoli pour ses propres fantasmes sexuels…

Je réalise qu’avant que ma conjointe sois prête à retrouver un travail à temps plein, je dois pouvoir à ma famille que j’aime…Mais quand les spécialistes ou psychologues disent que les victimes ont des séquelles à cause de l’inceste, ils devraient penser à la famille immédiate… qu’elles sont en train de construire ces victimes. Elles sont dépourvues de solution et ont de la difficulté à fonctionner… Les conjoints de ces victimes, eux aussi, voient leur vie basculer… Car rien ne va plus psychologiquement… Ébranlé… je dois continuer à pourvoir à ma famille et voir mon potentiel diminuer psychologiquement et monétairement. Après tout cela, nos rêves sont mis de côté… Et tout passe dans la réparation de ce que l’agresseur a fait… Moi, j’ai beaucoup de difficulté à accepter de payer monétairement pour ce que l’agresseur a fait subir à ma famille… et tout ces bris psychologiques que j’ai aujourd’hui… Cet agresseur a peut-être fait de bonnes choses dans la vie… eu de beaux moments avec ses enfants… il n’en reste pas moins que moi, je récolte tous les effets du mal qu’il a fait… incluant les séquelles de victimes.

J’ai eu le malheur de lui faire confiance en tant que beau-père. Aujourd’hui, j’en paie le prix ainsi que mon épouse et mes 2 filles. tous nos rêves et projets sont mis de côtés… Toute cette énergie que demande la thérapie sur moi-même et sur notre couple… je ne peux l’investir au travail pour me battre contre la manipulation qui règne de temps à autre. J’aimerais seulement que le temps s’arrête de tourner pour quelques semaines… Le temps de respirer un peu…

Gagner en clarté… c’est bien… mais comme deux personnes ne réagissent pas à la même vitesse… cela ne signifie pas que les problèmes se règles aussi rapidement que l’on gagne en clarté.

Patrick me consulte individuellement depuis quelques mois. Avec cette thérapie, il veux en arriver à libérer toute cette colère qui l’habite et qui le gruge de l’intérieur… Devenir plus fort… plus serein… Se permettre de commencer une nouvelle vie avec sa femme et ses enfants… Une nouvelle vie enjouée et pleine d’espérance… (Sa femme me consulte aussi individuellement et une fois par mois, ils viennent en consultation ensembles.)

Avec sa belle générosité , il vous offre un mandala (outil thérapeutique que j’utilise avec mes clients) qu’il a fait le 16 janvier 2004, incluant aussi, l’écriture d’introspection qui s’en est suivie…

Je vous invite à lire le Témoignage de Marie-Anne, la femme de Patrick.