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VÉRITÉ ET COMPASSION 


       
 

par A.H. Halmaas

Magnifique écrit sur la VÉRITÉ, la COMPASSION  et la SOUFFRANCE tiré de DIAMOND HEART 1, chap 7

« La compassion ne consiste pas à éliminer la souffrance mais à mener la personne vers la vérité, pour qu’elle soit en mesure de vivre une vie de vérité. C’est un élément important que nous avons tendance à ne pas voir parce que nous avons une conception fausse de ce qu’est la compassion. 

Regardez votre vie par exemple.  En quel type de compassion avez-vous cru? Sur quelle conception de la compassion vos actes sont-ils fondés?  

Nos mensonges et nos préjugés sont évidents pour la plupart d’entre nous. Notre compassion n’a pas été fondée sur un désir de vérité, mais sur un désir de nous sentir bien. 

Il ne s’agit pas là de la compassion essentielle, mais de la compassion émotionnelle. Nous pouvons comprendre qu’il est souffrant de voir quelqu’un souffrir.  Vous vous sentez parfois plein de compassion envers vous-mêmes quand vous souffrez, et cette compassion est aidante. 

Quelle est donc la relation entre la souffrance, la vérité et la compassion? La compassion est en quelque sorte un agent thérapeutique qui nous aide à tolérer la souffrance de voir la vérité. 

La fonction de la compassion dans le Travail ne consiste pas à diminuer la souffrance, la fonction de la compassion consiste à mener vers la vérité. 

La plupart du temps la vérité est douloureuse ou apeurante.  La compassion permet de tolérer la souffrance et la peur.  Elle est du côté de la vérité et nous aide à persister dans notre recherche de vérité. Ultimement, la vérité dissout la souffrance, mais il ne s’agit là que d’un bénéfice secondaire.

En fait, ce n’est que lorsqu’il y a compassion que les gens se permettent de voir la vérité. Lorsqu’il n’y a pas de compassion, il n’y a pas de confiance.  Si quelqu’un montre de la compassion à votre égard, vous lui ferez suffisamment confiance pour vous permettre d’être vulnérable et pour voir la vérité plutôt que de la rejeter. 

La compassion ne soulage pas la souffrance, elle la relie à la vérité et la rend tolérable. Cette façon de considérer la compassion fait une énorme différence dans nos vies.  Le fait de voir la compassion comme menant à la vérité plutôt que comme soulageant la souffrance peut changer la façon de nous comporter avec nous-mêmes, avec nos amis et avec tout le monde.

Même si la différence peut paraître subtile, une de ces perspectives vous éloignera de la vérité et l’autre vous y conduira. L’une vous maintiendra dans l’inconscience, l’autre vous aidera à voir la vérité.  Habituellement, nous nous protégeons de la souffrance, de la peur et de notre inconscient pour nous protéger de certaines vérités de notre inconscient. Cela nous protège’ également de la vérité de qui nous sommes, de notre essence.

Croyant agir avec compassion, nous essayons de protéger les autres de ces mêmes choses. Mais qu’est-ce que la compassion?  Nous vivons nos vies en essayant de protéger nos proches de la vérité, parce que nous pensons que la vérité les blessera. Nous nous protégeons de la vérité parce que nous pensons que la vérité nous blessera. Nous pensons que nous serons incapables de supporter la vérité. 

Je ne suis pas en train de dire que la compassion émotionnelle, qui consiste à vouloir soulager votre souffrance ou celle des autres, est mauvaise.  Surtout au début, quand vous commencez à vous connaître, ce genre de compassion peut être bénéfique et utile.  Mais si vous vous intéressez vraiment à l’essentiel, la compassion émotionnelle peut devenir un obstacle.

Pour atteindre l’essentiel vous devez travailler avec la véritable compassion, qui est la porte menant à la vérité. Il ne s’agit de rechercher la souffrance ou de rechercher le bonheur…mais de chercher la vérité.

Il est très étonnant de regarder nos vies et de voir à quel point nous agissons à partir de la compassion émotionnelle, à partir de la recherche du bonheur plutôt que de la recherche de la vérité. 

On peut voir, par exemple, à quel point nous essayons de protéger nos parents de la vérité de qui nous sommes vraiment. Certains de nous se demandent : « Comment puis-je être heureux? Ma mère est malheureuse, alors est-ce possible? » ou, « Comment puis-je être fort alors que mon père est faible? »

Alors nous repoussons ces vérités. Dans un sens, nous le faisons à partir de la compassion, de la compassion d’un enfant qui voit la souffrance et est incapable de la tolérer.  À partir de là, nous croyons que la compassion est un genre de protection. C’est comme cela que commence l’enfouissement de la vérité et l’enfouissement de notre essence.

Il existe une autre relation intéressante entre la vérité, la souffrance et la compassion. La plupart d’entre vous, qui avez appris à faire l’expérience de la compassion – les Soufis appellent ce phénomène la « latifa » verte, ce qui signifie  « subtilité » - ont constaté que la compassion émerge généralement de la vision de la vérité. Quand vous voyez la vérité, vous souffrez, et quand vous vous laissez ressentir la souffrance, la compassion émerge. La compassion émerge généralement quand une personne se permet  de faire l’expérience de la souffrance, et cette souffrance vient généralement du fait de voir la vérité sur vous-même et sur la situation. 

Si vous ne vous permettez pas de ressentir la souffrance, vous ne pouvez ressentir la compassion. C’est ainsi que fonctionne notre organisme. Il y a donc une relation réciproque entre la vérité et la compassion de même qu’il ya un lien entre la vérité, la compassion et la souffrance. 

Mais l’essentiel n’est pas la souffrance; la souffrance est quelque chose que nous avons à traverser.  Du point de vue de l’essence, la souffrance n’a pas d’importance. Ce qui importe est la vérité, la vérité à propos de nous-mêmes, peu importe la douleur, la souffrance et la peur pour s’y rendre. Il y a parfois souffrance pour que la personne puisse découvrir la vérité. 

(...) À mesure que nous développons notre présence à notre corps et à notre ventre, nous pouvons nous rapprocher de notre essence qui est la vérité, ce qui nous amène à distinguer le vrai du faux, non à partir d’une déduction logique ou de notre inconscient. Nous savons, tout simplement. Nous nous approchons du sens subtil de la vérité. Au bout d’un moment, nous réalisons que la vérité n’est plus un jugement à propos d’une situation ou d’un énoncé, mais qu’elle existe en elle-même. 

Alors l’essence est la vérité.   À chaque fois que vous sentirez la vérité en vous, à propos de vous ou d’une situation, vous saurez d’où viennent cette satisfaction et cette joie. Tout le travail que nous faisons sur la vision de la vérité trouve son sens dans cette vérité, cette vérité de l’essence.  Comme nous l’avons dit plus tôt, le processus d’apprentissage de la vision de la vérité nous amènera à sentir beaucoup de souffrance, de peur et d’humiliation.  Quand nous nous trouvons face au choix, soit de voir la vérité à notre sujet ou au sujet de quelqu’un d’autre, soit d’éviter la souffrance, comment agir avec compassion? 

Si vous choisissez d’éviter la vérité d’une situation, peu importe l’intensité de la souffrance qu’impliquerait le fait d’y faire face, vous vous condamnez à vivre dans le Monde du Mensonge.

Vous voyez donc qu’il y a une magnifique relation de cause à effet entre la vérité et la compassion. Les deux vont de pair.  La compassion mène à la vérité et la vérité mène à la compassion, et c’est généralement la souffrance qui nous fait éviter l’une ou l’autre. 
Nous voulons nous sentir bien.  Nous voulons protéger nos croyances et nos idées sur qui nous sommes. Nous cherchons  à éviter de voir la vérité sur les autres. Nous avons tous des croyances que nous chérissons à propos de ce que nous sommes, de ce qu’est le monde et de ce que le monde est sensé être. Le fait de voir ces croyances pourrait nous amener à souffrir, à avoir peur. Il en est ainsi parce que nous accordons de la crédibilité aux mensonges. 

Nous pensons que les mensonges sont la vérité, parce que nous n’avons pas confiance en la vérité en elle-même. Mais l’essentiel est la vérité, peu importe qu’elle coïncide ou non avec nos croyances.

Dans votre travail sur vous-même, vous réalisez que la vérité n’est souvent pas en accord avec vos croyances sur vous-même. Plusieurs d’entre vous avez découvert, par exemple, ce qu’est l’amour.  L’amour est différent de ce que vous pensiez.  Lorsque vous avez découvert ce qui était important, ce n’était pas ce que vous aviez pensé auparavant, n’est-ce pas? Quand vous vous êtes senti comblé, votre expérience correspondait-elle à ce que vous aviez pensé? Le fait d’avoir abandonné  vos conceptions antérieures a été souffrant, n’est-ce pas?  C’était apeurant. Vous vous êtes battu bec et ongles – « Non, Je ne laisserai pas aller cette croyance,»  avez-vous dit. Plus vous lâchez prise, plus vous faites l’expérience de ce qui est réel. 

Il est aussi intéressant de constater que la compassion va de pair avec la confiance. La confiance et la compassion sont presque la même chose. Souvent, nous ne faisons pas confiance à la vérité, nous ne ressentons pas de compassion envers nous-mêmes. L’engagement envers la vérité et le fait de vivre en fonction de la vérité, signifie, à un certain niveau, faire tout le chemin. Tout le chemin vers la réalisation que la vérité est la vérité, quelque soit la situation, que cela plaise ou non. Le fait qu’elle vous fasse peur ne la rendra pas fausse. 

Ce qui est, est. Qui nous sommes, la réalité du moment, tout cela est. Si vous faites preuve de compassion envers vous-même, vous pourrez voir cette réalité.  Le Travail, la vie elle-même, consiste à voir la vérité, à connaître la vérité et à être la vérité. 

Il y a une chose à propos d’une vie de vérité, de préoccupation pour l’essentiel, de sens, de profondeur, de subtilité, de joie intrinsèque et de satisfaction, qui fait que lorsque vous en faites l’expérience, vous ne voulez rien d’autre et vous êtes prêt à tout pour la vérité.  La vérité devient plus importante pour vous que tout autre chose.

Nous cherchons généralement à nous accrocher à nos croyances et à nos conceptions de nous-mêmes, en pensant qu’il nous serait impossible de vivre sans elles. Mais si vous avez de la compassion envers vous-même,  vous commencerez à vous faire confiance et vous commencerez à réaliser qu’en fait, c’est la vérité qui vous sauvera. »