Retour au blogue
 

VIOLENCES SEXUELLES: 
UN DÉNI FAMILIAL ET SOCIÉTAL 


    STOP À LA VIOLENCE - STOP AU DÉNI !

Pourquoi le refus cette évidence?
Depuis toujours, les violences sexuelles sont l’objet du DÉNI.  Il n’est pas question que l’on puisse envisager que nos chers enfants soient maltraités, violés…  Ce n'est pas possible... Ce n’est que des mensonges! Impossibilité ou incapacité d'entrevoir cette réalité.  Nous-mêmes, adultes, nous refusons cette éventualité.... Nous préférons garder l'illusion que nous avons vécu une belle enfance dans bonne famille aimante.

 

Éducation judéo-chrétienne
Les raisons du DÉNI sont bien enracinées dans la culture… qui commence avec la Bible et son premier commandement, fondement de notre civilisation judéo-chrétienne: « Honore ton père et ta mère… »  peu importe ce qu’ils te font vivre…   Instauration profonde d’un esprit de sacrifice qui contribue au déni et à la minimisation de la violence sexuelle.   Alors comment un enfant peut dire : « Mon papa, ma maman, mon frère, mon oncle m’a agressé…» Comment? 

Psychanalyse et « Complexe d’Œdipe » de Freud
Et cela se poursuit avec la psychanalyse.  Comme je le mentionne dans Le secret de Blanche ¹, autrefois lorsque Freud constate que les femmes qui le consultent, lui confient les sévices sexuels commis par leur propre père durant leur enfance, celui-ci,  développe alors la « Théorie de la Séduction ».  Et en 1897, il dit s’avoir trompé… et délaisse cette théorie pour le Complexe d’Œdipe dans lequel la « séduction » de l’agression réelle s’est déplacée par un « fantasme d’inceste ».   Sinon cela reviendrait à dire que tous les Viennois sont des violeurs d’enfants puisque toutes les femmes (ou un grand nombre) qui viennent le consulter ont été séduites par leur père.  L’inceste vécu  ne serait plus désormais qu’un fantasme sexuel relié à l’Œdipe. Et ainsi, la parole des victimes a été étouffée durant des décennies.² 

« Ce n'est qu'en 1924 qu'il décida d'admettre que ses clientes avaient bel et bien été abusées sexuellement par leur père. Il ne l'a pas fait auparavant afin de protéger la réputation des ces pères.  Cela s'est passé, il y a plus de cent ans, mais encore aujourd'hui cette mentalité destructive existe encore de nos jours, et empêche les abuseurs de se responsabiliser face aux gestes qu'ils ont commis. » ³

Imaginez les dégâts de cette théorie du Complexe d’Œdipe lorsqu’un enfant  qui ose confier que son papa met son pénis dans ma bouche… et le psy qui dit : « C’est le Complexe d’Œdipe.  C’est normal qu’un enfant ait des désirs incestueux pour son papa ou sa maman. »   Ce n’est pas des fantasmes…  C’est UNE RÉALITÉ!  Et cela se passe encore aujourd’hui en 2013.  

En ignorant les problèmes de responsabilités et l’état actuel des choses, il est incontestable que les théories freudiennes ont fait en sorte de figer les perspectives de solution du problème de l’inceste.  Avec la complicité du libéralisme sexuel et au nom d’une nouvelle morale, l’inceste est devenu un monstre adroit, jamais à bout des stratagèmes pour survivre.¹

Les théories anti-victimaires
Le Syndrome de Stockholm sociétal expliquerait l’apparition toujours plus fréquente de théories anti-victimaires qui protègent les agresseurs et auxquelles la société entière adhère.  Par exemple : le Syndrome d’Aliénation Parentale (trouble dans lequel un enfant, de manière continue, rabaisse et insulte un parent sans justification), la théorie des faux souvenirs, le mythe des enfants « carencés », la résilience mal comprise, le Syndrome de Médée (harcèlement mise en œuvre par un parent voulant priver son conjoint de la relation avec ses enfants et apparaissant à l’occasion d’une rupture conjugale.), etc.  

Le Dr. Gérard Lopez2, psychiatre-expert à la Cour d'Appel de Paris, président fondateur de l’Institut de victimologie à Paris, dit à ce sujet : « Ce déni est renforcé par toutes sortes de fausses théories qui ne reposent sur aucune preuve scientifique, comme le soi-disant syndrome d’aliénation parentale, la résilience mal comprise, ou selon le mythe que les enfants "carencés" seraient mythomanes, surtout depuis Outreau… bien que les enfants aient tous été reconnus victimes de viols et actes de proxénétisme par la justice. En fait, chacun d’entre nous refuse d’admettre que nos chers enfants sont massacrés. »  Article à propos du Dr. Gérard Lopez et de son livre "Enfants violés et violentés. Le scandale ignoré"    

Des proportions épidémiques
Dans son livre, Parents toxiques, Susan Forward 4 affirme que lorsqu’elle a attiré l’attention sur les proportions épidémiques de l'inceste, (tout comme moi) elle s’est heurtée à une forte résistance.  Elle dit à ce sujet : « Il y a dans l'inceste quelque chose de particulièrement laid et répugnant qui empêche tout bonnement les gens d'admettre son existence.  Au cours de ces dernières années, la négation a fini par reculer devant l'évidence accablante et l'inceste est devenu un sujet reconnu – bien que encore gênant – de discussion publique… Ce n’est que récemment, au début des années  quatre-vingts, que nous avons commencé à prendre conscience de la réalité quasi épidémique de l’inceste.  Avant cette époque, la plupart des gens croyaient que l’inceste ne concernait guère plus d’une famille sur mille. »    Aujourd’hui, nous savons que l’inceste ne sévit pas que dans les familles défavorisées, sans éducation, ou encore dans les milieux isolés et rétrogrades. Il frappe tous les niveaux socio-économiques, donc aussi, dans  les familles les plus nanties.  L’INCESTE EST UN FLÉAU SOCIAL!

L ’illusion d’une bonne et gentille famille
Comme dans les familles où les enfants se font battre, la plupart des familles incestueuses paraissent normales aux yeux de tous.  Chaque membre souffre d’une grande solitude affective qu’il apprenne à dissimuler.  L’insatisfaction, le stress et le manque de respect sont des aspects de la problématique de l’inceste qui peut être considéré comme l’anéantissement complet de la famille. Même si ces familles tentent de nous faire croire qu’il n’y a aucun problème dans leur famille et que tout va bien, ce n’est qu’une illusion que l’on doit s’affranchir pour parcourir le chemin de la réalité afin de dissoudre le pattern de l'inceste, tendre vers une réelle guérison ainsi qu’une vie plus harmonieuse.

Absence de reconnaissance de la gravité des violences sexuelles
Les violences sexuelles rarement identifiées, particulièrement l’inceste, les agresseurs encore bien moins dénoncé… Le déni des violences sexuelles a d’énormes conséquences sur la santé qui ne sont presque jamais décelées, ni traitées, mais la plupart du temps les victimes vont être abandonnées, rejetées, exclues, condamnées à cause de leurs symptômes, sommées de s’expliquer et de se justifier par rapport aux troubles du comportement et des conduites qu’elles développent fréquemment, ce sont elles que la société va culpabiliser.  Il n’est pas rare de rencontrer des victimes qui ne peuvent plus fonctionner dans la vie.  Le peu d’énergie qui leur reste ne sert qu’à survivre… jour après jour.  Et aller en thérapie spécialisée avec cette problématique (en pratique privée) demande un investissement important que plusieurs victimes ne peuvent se permettent ou prioriser financièrement étant donner leurs conditions de vie.

Murielle Salmona,  psychiatre, victimologue, psychotraumatologue, présidente de l’association Mémoire traumatique et victimologie et Responsable de l’Institut de Victimologie,  dans son dernier livre,  Livre noir des violences sexuelles  affirme que les violences sexuelles sont en augmentation, et que les victimes sont à 80% des femmes.  Ces chiffres sont catastrophiques!   Elle parle d’un DÉNI MASSIF de cette RÉALITÉ.  Elle dénonce la loi du silence même par les acteurs médico-sociaux.  L’absence de reconnaissance de l’impact des violences sur les victimes et de prise en charge globale médicale, sociale et judiciaire, qu’elle qualifie de scandale de santé publique.   

Dans un article , elle dit à ce propos: « Il est urgent d’améliorer la formation de tous les professionnels rencontrés par les victimes : des policiers aux juges et aux procureurs, en passant par les soignants et les enquêteurs, tous doivent posséder une meilleure connaissance de la réalité des violences et des traumatismes des victimes pour ne pas passer à côté d’elles. Ils doivent pouvoir reconnaître les symptômes présentés par la victime comme des éléments de preuve et non comme des éléments disqualifiant leur parole. Je pense, par exemple, à la sidération qui empêche la victime de réagir, aux troubles de la mémoire et aux conduites d’évitement qui l’empêchent de parler, aux symptômes dissociatifs, où elle semble déconnectée et peut raconter avec détachement des violences graves qu’elle a subies. En tant que professionnels, ils ne doivent pas se méprendre sur l’apparente « bonne réaction » des victimes ou croire qu’elles leur mentent, celles qui semblent le moins touchées peuvent, au contraire, se trouver dans un profond état de dissociation et d’anesthésie émotionnelle générées par leurs agressions. » Tiré de Muriel Salmona «La réalité des violences sexuelles est l’objet d’un déni massif»

STOP à la VIOLENCE... STOP au DÉNI!  
Pour se donner l’opportunité de guérir… briser le pattern des violences sexuelles… se réapproprier de sa vie… il n’y a qu’une solution… SORTIR DU DÉNI… DU SILENCE… aller chercher de l’aide approprier… Oser se lever debout fièrement… pas à pas… retrouver sa dignité… son intégrité… Ce n’est qu’en affrontant la VÉRITÉ telle qu’elle EST… que nous pouvons reprendre contact avec nos potentialité, les déployer et parcourir le Chemin de notre propre Guérison. Ainsi, nous semons des graines de vie qui porteront fruits à d’autres… qui à leur tour se lèveront debout pour entreprendre leur propre parcours…

 

Références :
¹LANDRY, Blanche (1999), Le secret de Blanche , Montréal, Éd. de l’Homme.
²LOPEZ, Gérard. (2013), Enfants violés et violentés, le scandale ignoré,  Éd. Dunod.
³LANDRY, Blanche. La spiritualité au coeur de la guérison des traumatismes reliés aux abus sexuels,  Le Réseau  Hiver 2001 Volume 4, Numéro 1 
4 FORWARD, Susan. (2000). Parents toxiques : Comment se libérer de leur emprise, Éd. Marabout
5 SALMONA, Murielle. (2013), Le livre noir des violences sexuelles, Éd. Dunod.